LA STRATÉGIE DOMINICAINE 🇩🇴 DE DÉSTABILISATION D’HAÏTI 🇭🇹(2010–2025)
- Wilsonn Telimo Lwi

- il y a 6 jours
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LA STRATÉGIE DOMINICAINE 🇩🇴 DE DÉSTABILISATION D’HAÏTI 🇭🇹(2010–2025)
I. La guerre invisible : Haïti, République occupée par procuration
Depuis plus de quinze ans, Haïti ne vit pas une crise — elle subit une opération de neutralisation planifiée. Ce n’est pas une guerre de balles, c’est une guerre d’institutions. Une guerre propre, silencieuse, économique, politique, et diplomatiquement maquillée. Une guerre où les armes sont les programmes, les lois économiques, les ONG, et les élites complices.
Derrière les gangs et les décombres se cache une stratégie d’ingénierie géopolitique : affaiblir Haïti pour mieux l’intégrer, sous tutelle économique dominicaine et occidentale, dans une zone de production à bas salaires et de consommation dépendante.
Le chaos apparent — gangs, misère, paralysie — n’est pas une conséquence : c’est un modèle d’affaires.
Cette stratégie, initiée dans le contexte du programme HOPE/HELP (2006–2010) et de la reconstruction post-séisme sous la supervision du Clinton Global Initiative / IHRC, a été consolidée par une alliance implicite entre trois blocs d’intérêts :
1. Le capital américain, sous le masque du “développement”, via la BID, la Banque mondiale et l’USAID ;
2. Le secteur privé dominicain, structuré autour d’une économie d’exportation et de sous-traitance ;
3. La bourgeoisie haïtienne comprador, dont les profits dépendent de l’importation, de la contrebande et du désordre.
Le résultat : une Haïti volontairement maintenue dans un état de dépendance, de fragmentation politique et de précarité structurelle — condition nécessaire à l’exploitation maximale de sa main-d’œuvre, à la neutralisation de sa souveraineté économique, et à la justification d’une future “union économique de fait” sous contrôle dominicain.
Haïti n’est donc pas seulement ruinée : elle est tenue en laisse. République sous-traitée, marché captif, peuple prisonnier d’une guerre économique sans fin.
Le projet?
Transformer notre indépendance en simple souvenir symbolique.
II. De HOPE à l’humiliation : quand la reconstruction devint recolonisation
La loi HOPE (Haitian Hemispheric Opportunity through Partnership Encouragement Act), un cheval de Troie économique, votée en 2006, qui devait revitaliser le secteur textile haïtien, créer 70 000 emplois et réintégrer Haïti dans le commerce international. Mais l’histoire retiendra que ce fut le plus grand piège économique du XXIe siècle pour Haïti.
Réalité : 500 investisseurs étrangers, dominicains et américains, s’appropriant le marché, pendant que les entrepreneurs haïtiens étaient tenus à distance.
Joël Deeb l’avait prédit : “Le gâteau de la relance sera mangé sans les Haïtiens.” Et c’est ce qui s’est produit.
L’industrie textile haïtienne n’a pas été ressuscitée, elle a été mise sous tutelle. La main-d’œuvre haïtienne est devenue l’arme de la pauvreté organisée.
Les Chambres de commerce locales? Figurantes dans une pièce écrite ailleurs.
Les institutions internationales? Les véritables architectes d’un nouveau servage industriel.
La BID (Luis Alberto Moreno) et des firmes dominicaines se sont positionnées comme bénéficiaires de la main-d’œuvre haïtienne bon marché, tandis que les Chambres de commerce haïtiennes, désorganisées, se sont retrouvées reléguées au rang de figurantes. Les avantages tarifaires américains se sont transformés en plateforme d’exploitation, non de reconstruction.
Puis vint 2010, et le séisme servit de prétexte à la mise sous contrôle totale du pays. Sous le drapeau de la compassion, Bill et Hillary Clinton transformèrent la reconstruction en marché. Leur Commission (IHRC) fut le laboratoire d’une recolonisation technocratique : Caracol, les permis miniers, les zones franches, les contrats exclusifs…
Tout au profit d’investisseurs étrangers, rien pour la souveraineté nationale. Haïti fut reconstruite, mais pas pour les Haïtiens.
Autrement dit : La politique américaine visait à transformer Haïti en plateforme d’assemblage sous contrôle logistique dominicain, neutralisant la possibilité d’un développement endogène.
III. La stratégie dominicaine : affaiblir Haïti pour contrôler le marché et la main-d’œuvre
La République dominicaine ne veut pas envahir Haïti. Elle veut la maintenir en coma économique contrôlé. Un voisin faible, fragmenté, affamé — parfait pour fournir de la main-d’œuvre, absorber les produits dominicains, et justifier une posture de “stabilité” aux yeux de Washington.
La République dominicaine applique une stratégie inspirée du modèle israélo-palestinien : tolérer et instrumentaliser l’instabilité chez le voisin pour maintenir un équilibre géopolitique favorable.
1. Main-d’œuvre à bas coût : les flux migratoires haïtiens assurent à la RD un réservoir de travailleurs précaires, privés de droits et remplaçables.
2. Captation du marché haïtien : 80 % des produits de consommation en Haïti proviennent de la RD, dont une large part de “junk food” et de produits agricoles subventionnés.
3. Influence politique : les principaux partis et médias haïtiens reçoivent, directement ou par intermédiation, des financements d’acteurs économiques liés à la RD.
4. Souveraineté neutralisée : le système judiciaire, les douanes et une partie du Parlement haïtien sont infiltrés par des agents économiques à double loyauté.
Les Mécanismes de la stratégie
a. Tolérance frontalière sélective :
Les autorités dominicaines ferment la frontière aux produits haïtiens légaux, mais laissent circuler armes, denrées, carburant et contrebande destinés aux gangs. Cela alimente simultanément le chaos et la dépendance.
b. Financement indirect des groupes armés :
Les transferts de fonds transitant par la RD (commerçants, transporteurs, changeurs) servent souvent de canaux d’acheminement de ressources vers les chefs de gangs, sous couvert de commerce transfrontalier.
c. Expansion économique par intégration forcée :
Les zones franches et projets miniers en Haïti sont adossés à des infrastructures dominicaines, faisant de l’économie haïtienne une simple périphérie d’exportation.
L’exemple du Parc Caracol est emblématique : financé par les États-Unis, géré par Sae-A Trading (Corée du Sud), approvisionné via Santo Domingo, il bénéficie très peu aux communautés locales.
d. Couverture diplomatique :
La RD se positionne comme “bastion de stabilité” face au chaos haïtien, justifiant son expansion économique et son militarisme frontalier. Ce discours séduit Washington et renforce l’image d’Haïti comme “État failli” nécessitant tutelle.
Inutile de dire, la RD se présente comme “victime” du chaos haïtien, alors qu’elle l’alimente. Haïti ne contrôle plus son économie, ni sa frontière, ni même sa violence. Elle loue sa misère à ses bourreaux.
IV. L’ennemi de l’intérieur : la bourgeoisie compradore
Pendant que la République dominicaine affûtait ses stratégies, une partie de nos élites s’agenouillait. Elles ne sont plus haïtiennes — elles sont franchisées. Elles importent les produits dominicains, les idées dominicaines, les fonds américains, et exportent la misère. Elles financent les politiciens comme on achète des chiens de garde. Elles possèdent les médias, les tribunaux, les douanes. Elles contrôlent le chaos pour protéger leurs marges.
Les MRE — morally repugnant elite — sont devenus les intendants de notre captivité. Ils gèrent la dépendance comme une rente, et vendent l’État morceau par morceau.
Ce sont eux, les courtiers du néocolonialisme. Ce sont eux, les instruments de la République dominicaine et de Washington. Ils n’ont pas de patrie — seulement des comptes en banque.
V. Objectif final : détruire la souveraineté haïtienne par le chaos
L’instabilité est devenue doctrine. Chaque crise politique est un outil. Chaque gang est un sous-traitant de la stratégie régionale. Chaque ONG est une antenne de contrôle social.
Pourquoi?
Parce qu’un État haïtien fort, stable et souverain serait :
1. Un concurrent industriel direct de la République dominicaine ;
2. Un symbole noir de libération dans un ordre mondial encore colonial ;
3. Une menace idéologique pour ceux qui veulent maintenir les peuples du Sud dans la dépendance.
C’est pourquoi la stratégie dominante vise à maintenir un seuil permanent d’instabilité fonctionnelle, suffisant pour empêcher la refondation d’un État fort, justifier les interventions étrangères et les missions “techniques” de supervision, et contrôler le narratif international (Haïti = chaos, RD = modèle de réussite).
Autrement dit : Préserver le chaos, c’est éviter la souveraineté. Et c’est exactement ce que font ceux qui prétendent “aider Haïti”.
VI. Appel à la résistance intellectuelle et politique : le temps de la désobéissance nationale
Peuple haïtien, il faut ouvrir les yeux. Ta misère n’est pas un accident, c’est un outil. Ta faim n’est pas une tragédie, c’est une stratégie. Ta colère est légitime mais elle doit devenir lucide.
Chaque pénurie, chaque flambée de violence, chaque décret “technique” imposé par l’extérieur participe à une même architecture : celle d’un asservissement économique et géopolitique planifié.
Nous devons exiger :
1. Une enquête internationale indépendante sur les liens économiques entre la RD, certains acteurs haïtiens et les groupes armés ;
2. La publication intégrale des contrats HOPE, HELP, Caracol, IHRC, et des permis miniers post-2010 ;
3. Exiger du Département d’État américain et de la BID la transparence complète sur les bénéficiaires réels des fonds post-2010
4. Une rupture diplomatique conditionnelle jusqu’à la fin du financement indirect des gangs par la RD ;
5. Imposer une doctrine nationale de souveraineté économique, visant à reconstruire le secteur productif haïtien en dehors de l’économie de dépendance dominicaine. C’est-à-dire, réindustrialiser, produire, protéger, et contrôler.
L’heure n’est plus au commentaire. L’heure est à la désobéissance nationale. Car un peuple qui comprend son asservissement devient ingouvernable.
Haïti n’a pas besoin de sauveurs. Elle a besoin de conscience. Et cette conscience, c’est toi, c’est moi, c’est nous — la génération qui ne pliera plus.
Jeunesse d’Haïti — étudiantes, étudiants, universitaires, jeunes des classes dominantes, moyennes et défavorisées : ceci vous concerne directement. L’avenir industriel, économique et politique de notre pays dépend de votre lucidité, de votre courage et de votre mobilisation organisée.
Si vous êtes jeune, formé·e, conscient·e : pourquoi rester spectateur·rice?
Voici pourquoi vous devez me rejoindre et comment agir dès maintenant.
Pourquoi vous?
1. Vous êtes la force critique la plus crédible. Vos savoirs, compétences et réseaux (universités, ONG, diaspora) peuvent déverrouiller informations, preuves et stratégie.
2. Vous avez la légitimité morale : vous vivez la précarité et en comprenez les mécanismes ; vous pouvez traduire la colère en projet.
3. Vous êtes mobiles, créatifs·ves, bilingues, connectés·es — exactement ce qu’il faut pour construire alternatives concrètes.
Non à l’improvisation, oui à l’organisation.
La désillusion n’est pas une excuse pour la passivité. Notre force réside dans la structure : équipes de recherche, cellule média, cellule juridique, cellule logistique. Chacune doit avoir un pilote, un calendrier et un livrable mesurable.
En résumé, pourquoi maintenant?
L’expiration (2025) de HOPE/HELP est un moment de rupture. On peut subir la crise (plus de chômage, plus de misère) ou orienter la rupture vers la souveraineté : audits, révélations, projets productifs, alliances internationales critiques.
La jeunesse éduquée est la clé. Sans vous, la mémoire continue d’être réécrite par d’autres. Avec vous, Haïti peut reprendre la plume.
Si vous êtes prêt·e·s à agir : écrivez-moi maintenant.
Ne laissez pas les promesses mortes définir notre destin. Le futur se construit — pas se subit. Soyez celle·celui qui transforme la colère en projet, la connaissance en pouvoir.
Kervens Louissaint, un nom à retenir.













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